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Le blog de Théophile Kouamouo
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4 juin 2007

La Côte d’Ivoire est-elle mal (re) partie ?

Temps incertains ! Comme toutes les périodes de transition, les moments que nous vivons sont difficilement déchiffrables. Nous sortons d’une guerre qui était, déjà, une manifestation d’une longue transition (politique, économique, géostratégique) mal gérée. Nous sommes désormais dans une petite transition chargée de clore la longue transition qui a commencé depuis une vingtaine d’années. Tétanisés, hyperactifs, sereins ou complètement paniqués, les acteurs politiques et sociaux tentent soit de s’adapter à la nouvelle donne soit de la torpiller avec les moyens de bord.

Les analystes sont tentés d’épouser la ligne de fracture tracée par les politiques. Cette ligne sépare les «Ivoiro-optimistes» et les «Ivoiro-pessimistes». Les premiers, issus de la galaxie patriotique et de la rébellion, sont les grands gagnants de l’après-Ouagadougou, et ne peuvent que consolider, par tous les moyens, un «nouvel ordre politique» (sic !) qui leur profite. Les seconds, venus des rangs du RHDP ou faisant partie des «frustrés» du camp républicain, estiment que la paix se fait contre eux, et tentent de la fragiliser pour montrer leur pouvoir de nuisance et pour être, au final, pris en compte.Le Courrier d’Abidjan se situe indubitablement dans la galaxie patriotique, même s’il se réserve le droit de critiquer ses animateurs et ses champions. Pouvons-nous faire la moue et jouer les rabat-joie dans nos projections sans faire désordre ?

Il est essentiel de distinguer deux choses : l’opportunité de retour à la paix représentée par cette phase de la «crise ivoirienne» et les perspectives de la Côte d’Ivoire d’après-crise.

Sortir de la guerre n’est pas tout. Il essentiel d’évaluer dans quel état nous sortons de cette guerre, quels sont nos projets et aspirations pour le futur, et quels sont les moyens dont nous disposons ou que nous comptons acquérir. Il est urgent de déterminer quel modèle de développement nous choisissons - les patriotes ivoiriens se sont battus, souvenons-nous, pour pouvoir choisir leur destin.«Au temps de Boigny ô/y avait la joie ô/au temps de Boigny ô/y avait la paix ô», chante le refrain populaire. La paix revenue, allons-nous reproduire le modèle houphouëtiste ? Ce système - fortement étatisé et fondé essentiellement sur une agriculture populaire dont les recettes sont centralisées et gérées par quelques happy few organisant le rapport du pays au monde extérieur et planifiant son développement - est-il encore viable aujourd’hui ? A priori, non. Pour des raisons écologiques : les forêts ivoiriennes prennent des airs de gruyère et à toujours leur demander plus, on risque de graves périls. Pour des raisons sociologiques : l’espace rural ivoirien est aujourd’hui l’objet d’une concurrence acharnée qui crée des tensions intercommunautaires ou intrafamiliales. Par ailleurs, le système sur lequel s’est fondé le miracle ivoirien développe aujourd’hui ses tares les plus irritantes, tandis que ses acquis s’évaporent. Ainsi, la centralisation de la richesse nationale par quelques-uns a créé une corruption échevelée, une impunité généralisée, un travestissement permanent de la règle de droit, des appétits et des frustrations qui ont débouché sur la guerre - ceux qui l’ont financée n’ayant dépensé autant d’argent en achats d’armes que parce que l’objet de leur désir (le pouvoir) était également une mine d’or.

Le président Laurent Gbagbo, alors qu’il était dans l’opposition, a diagnostiqué la péremption du système houphouëtiste et a préconisé une «refondation». Déclinée en projets, elle ne s’est pas concrétisée parce qu’elle n’a jamais culturellement triomphé : les vieux modèles sont restés gravés dans les esprits, tant parmi les zélateurs de l’Ancien Régime qu’au sein de ses détracteurs. La guerre a permis aux Ivoiriens de réaliser qu’ils devaient être, à titre individuel et collectif, des acteurs de l’économie de leur pays et non plus simplement des spectateurs du huis clos entre l’Etat et les multinationales étrangères. Sommes-nous résolus à tirer les leçons de la crise ? Si oui, nous devons réussir à diffuser un certain nombre de valeurs.

Pour ne pas être les otages consentants de l’investissement étranger, que nous attendons ou que nous sollicitons souvent pour peu de choses, il nous faut urgemment développer une culture de l’épargne et du crédit. Certes, les établissements financiers ont le devoir de briser les barrières à l’accès aux comptes en banque, de créer des produits d’épargne bien rémunérés et de réfléchir à des modèles de prêts adaptés. Mais l’Etat doit les y engager à travers des lois, des directives, des incitations. Quelles sont les propositions de nos économistes ? Quels crédits sont dégagés pour la recherche dans ce domaine ? Demain s’invente aujourd’hui !

Il nous faut également bâtir, par nos efforts conjugués, une culture de l’effort et du mérite. Ces dernières décennies, le printemps démocratique et la prolifération des intégrismes partisans ont achevé de transformer les appartenances politiques ou ethniques en valeurs au détriment des qualités individuelles. Une manifestation de cette tendance suicidaire est sans aucun doute la fraude et les passe-droits lors des concours d’entrée dans les grandes écoles de la Fonction publique. Tous les discours appelant les jeunes à l’excellence deviennent vains lorsque ceux qui ont des relations surclassent sans problème ceux qui ont des idées et/ou du talent. Certains analystes, parmi lesquels figure l’ami Isaac Tapé, suggèrent par exemple la création d’une Haute Autorité de Contrôle de la Régularité des Concours, dépendant directement du président de la République et engageant sa responsabilité. Nous les soutenons !

Le numéro un ivoirien s’est engagé dans la création du Village Ivoirien des Technologies de l’Information et des Biotechnologies (VITIB) de Grand-Bassam et a expliqué qu’après le cacao, les technologies de l’information doivent désormais être le principal axe de la prospérité de son pays. Il a raison ! Seulement, les technologies de l’information ne sont pas portées, contrairement au cacao, par une masse industrieuse de paysans dociles. Elles exigent l’implication de la frange éduquée de la jeunesse. Comment la jeunesse ivoirienne utilise-t-elle les technologies aujourd’hui ? A-t-elle un usage passif de consommatrice ou un usage actif ? Combien comptons-nous de bloggeurs, de développeurs d’applications sur le net, de fabricants de logiciels répondant aux problèmes de notre société ? Les communautés de technophiles prolifèrent dans l’Afrique anglophone. Que va-t-il se passer ? Allons-nous exporter à la fois les technologies, les ingénieurs, les techniciens et les créatifs pour bâtir le projet ambitieux de Grand-Bassam ? Notre université publique est dans un coma profond, cela signifie que nos intelligences sont en berne. Ce n’est pas encourageant.

Le commerce électronique est l’un des domaines les plus prometteurs des technologies de l’information ; et il repose essentiellement sur le «one-to-one» (rapport direct vendeur/acheteur), donc sur la Poste et les autres entreprises d’acheminement de colis. Pendant que le projet futuriste de Bassam est en pleine construction, la Poste de Côte d’Ivoire est en plein délitement. Elle meurt sous les coups de canifs des différents intérêts rentiers qui se télescopent.

Réjouissons-nous du retour attendu de la paix, mais inquiétons-nous de l’inversion des valeurs qui risque de nous conduire à une seconde guerre ou à des désordres croissants.

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Commentaires
I
kouamouo, pourrais tu trouver le moyen de supprimer les emails injurieux manifestement? je comprend ta volonté de ne pas animer un site de "monopoint" de vue pour favoriser le debat contradictoire, voir définir la charte du blogueur?<br /> <br /> Tu as abordé un point que je trouve essentiel et concrèt, celui des examens et concours, actuellement la seule voie objective pour un jeune diplômé d'intégrer le marché du travail mais aussi de déterminer son aversion pour le pouvoir actuel selon le résultat est de passer un de ces nombreux concours publics au déroulement obscur.<br /> <br /> tapé que j'ai eu beaucoup plaisir à lire au courrier, a eu une idée révolutionnaire car apportant une solution pratique et responsabilisante à ce problème!<br /> <br /> le système de la camera caché doit etre encouragé en cote d'ivoire, c'est un bon moyen de lutter contre la corruption les pots de vin et autre attitudes compromettantes!<br /> <br /> Ce que les gens ignorent c'est que souvent leur argent pour payer les concours se perd dans une maffia qui n'a rien à voir avec l'organisme qui s'occupe du dit examen! il ya même des gens qui réussissent par leur propres ecrits le jour de l'examen et qui ont l'impression que leur argent a payé. <br /> <br /> Tout cela doit etre mis au grand jour!<br /> <br /> GBagbo à mon sens applique l'adage selon lequel on ne reste pas dans magnan pour enlever magnan!il faut qu'il fasse attention car ces scandales (qu'ils soient avérées ou pas) risquent d'être payés cash aux élections surtout legislatives et municipales!<br /> <br /> dernière préoccupation, ton clin d'oeil au courrier annonce t'il un arrangement à l'amaiable et ton retour dans ce journal?
G
On pourrais mieux juger les réfondateur si on les avais laisser travailler sans les avoir contraint avec une ayant fait plus de victimes à leur coté que le bon sens refuse d'ignorer
I
faut il rappeler à mat que tout ce qui se fait de grand commence par un rêve, commence par le verbe? traiter quelqu'un de rêveur c'est lui reconnaitre des idées novatrices. Si tu ne rêves pas du "garba" comment feras tu pour l'avoir? L'histoire de l'humanité est marquée par les rêveurs, Et comme c'est connu que l'afrique est caractérisée par la rigidité au changement, pardonnons à "notre ami" mat.<br /> Cependant ne ramenons pas le débat évolutif aux pour et anti refondaeurs car en fait dépuis 2002 toute la classe politiqueest comptable des actes posés en cote divoire!
M
Lol, Grand-Bassam?<br /> <br /> Vous les réfondateurs, vous êtes vraiment des incapables...<br /> <br /> http://cipdtf.ruwenzori.net/GbagboRael.htm
L
Salut,<br /> <br /> Cette compartimentation (assez facile) des Ivoiriens peut sérieusement biaiser ce débat. C'est à se demander si elle n'est pas inscrite dans ce texte avec l'intention de ramolir certains Afrinétariens. Puisqu'il suffit de faire quelques critiques pour être taxé de "frustré"; cad dans l'entendement populaire: aigri, jaloux de la réussite des autres.<br /> <br /> Certaines interrogations:<br /> -Les différents centres d'apprentissage en CI disposent-ils des moyens pour susciter la vivacité culturelle, intellectuelle, scientifique?<br /> -Gbagbo a-t-il voulu sérieusement réussir son programme? Si oui, le choix des animateurs et autres encadreurs de ces projets révolutionnaires laissent à désirer.<br /> -Pourquoi s'évertuer chaque fois à ne citer que Lumumba, Nkrumah, Olympio qui ont, en fait, ...échoué? En termes de management, il y a ce qu'il est convenu d'appeler la "théorie de l'effectivité". Le tout-venant a des projets. Quand nous étions encore plus jeunes, nous nous sommes tous fixés diverses ambitions et nous rêvions tous de transformer le monde lorsque nous étions étudiants!!! Que ces leaders aient nourri ces ambitions ne relèvent donc d'aucun génie. Le génie se prouve dans la capacité à les réaliser. Ce qu'ils n'ont pu (ou su) faire. Alors ces exemples ne vont-ils pas créer la litanie, l'apathie? Puiqu'en fin de compte, sur le Continent, il suffit d'avoir de bonnes intentions pour figuerer au panthéon des hommes illustres. <br /> -Dès lors, quelles références pour la jeunesse africaine? Pourquoi pas Mandela, C. Modibo Diarra? Pourquoi s'évertuer à citer ceux qui ne sont enrichis qu'en empruntant divers raccourcis comme modèles de réussite?<br /> <br /> Pour en revenir au sujet du jour, l'amorce d'une réflexion véritable, certes douloureuse mais bénéfique ne s'effectuera que par le détournement de notre regard inquisiteur pour le braquer sur nous-mêmes. Car, les ivoiriens sont totalement persuadés qu'ils sont totalement étrangers aux maux qui minent le pays. Se demander donc comment les autres (y compris la France) ont accrû leurs capacités techniques, propulsant l'homme dans l'espace, créant ce que nos dieux (sic) les plus puissants sont incapables de faire même dans nos rêves les plus échevelés!<br /> <br /> Comme plan directeur, nous pouvons nous baser sur les OMD. Je me permets donc de faire les suggestions suivantes en me basant sur les OMD:<br /> -Eliminer l'extrême pauvrété et la faim: Cette crise a fait sombrer de nombreuses personnes dans la misère. L'accès aux services financiers (épargne et prêt) s'est encore amoindri. Les banques servent généralement les administrations, le secteur structuré et les ménages fortunés. Il y a également les obstacles structurels à ne point négliger si nous voulons batir une économie nationale. Les agences sont peu nombreuses et généralement implantées dans les villes. Pour ce qui est des prêts, ils stagnent; ce qui limite les fonds de roulement et d'investissement, dans l'agriculture notamment.<br /> -Assurer l'éducation primaire pour tous: selon les statistiques de l'Unesco, moins de la moitié des enfants nés sur le territoire ivoirien a accès à l'école. Il va sans dire que cette anomalie est à corriger le plus tôt possible. Il ne faut pas oublier que dans la partie occupée par les rebelles, les enfants ont accès au CP1 à l'âge de...8-10 ans!<br /> -Promouvoir l'égalité des sexes et l'autonomisation des femmes: c'est le premier pas sur l'élimination des inégalités anciennes. Par une sorte de discrimination positive, maintenir les filles à l'école jusqu'à l'enseignement secondaire ( au moins); et si possible, leur faire bénéficier d'une formation professionnelle. Les tares du Code du travail ivoirien à l'endroit des femmes sont à éliminer <br /> le plus tôt possible.<br /> -Réduire la mortalité des enfants de moins de 5 ans: encourager les programmes de lutte contre le paludisme, faciliter l'accès aux soins médicaux aux femmes enceintes.<br /> -Améliorer la santé maternelle: mettre tous les moyens en oeuvre afin de réduire la mortalité maternelle.<br /> -Combattre le VIH/Sida, le paludisme et d'autres maladies: le sida est devenu la première cause de décès prématurés en Af sub et il se répand à un rythme effrayant. le paludisme et la tuberculose tuent ensembles autant de personnes que le sida. Ces maladies conjuguées déciment une bonne partie des mains valides. Encourager donc les mesures préventives en des termes médicaux.<br /> -Assurer un environnement durable: le texte de Théo est clair là-dessus. Vivement que les grands partis se penchent sur la question écologique dans leur programme de développement; que le ministère de tutelle ne soit plus le parent pauvre du gouvernement!<br /> -mettre en place un partenariat mondial pour le développement: diversifier au maximum nos partenaires économiques. Songer à arracher "la prunelle" de l'économie moderne (eau, énergie, télécommunication, grands travaux,...) de la main-mise française.<br /> <br /> Il y a véritablement fort à dire sur ce sujet. Voici tout de même des pistes à éclaircir davanatage pour le mieux-être de l'après crise.
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